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Comment Saccharomyces boulardii resserre les écarts en cas d’imperméabilité intestinale ?

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L’imperméabilité intestinale et l’importance d’un microbiome sain

Dans les conditions qui favorisent l’imperméabilité intestinale, les éléments qui composent le bol alimentaire, et restent normalement en lieu sûr, dans la lumière intestinale – y compris les macromolécules alimentaires non-digérées, les toxines, bactéries ou composants bactériens que l’on appelle des endotoxines – peuvent alors passer à travers la fragile membrane muqueuse unicellulaire de l’intestin grêle et atteindre le flux sanguin. Cela peut engendrer des lésions tissulaires dans le corps entier.[1] Cette imperméabilité intestinale peut contribuer à l’aggravation de maladies chroniques et de la qualité de vie chez certaines personnes souffrant de dépression,[2] de maladies rénales,[3] de maladies cardiovasculaires,[4] de maladies intestinales inflammatoires, du syndrome du côlon irritable, d’un diabète de type 2, d’obésité et d’une infection au VIH.[5] Les maladies auto-immunes ont également été associées à l’imperméabilité intestinale.[6] En effet, l’imperméabilité intestinale semble être une condition sous-jacente qui doit impérativement être évaluée et traitée avec une approche intégrative. 

Le microbiome fait l’objet d’une grande attention depuis peu. Les connaissances scientifiques dont nous disposons aujourd’hui sont vastes et étendues, et la science reconnaît de plus en plus le rôle déterminant du microbiome dans l’évolution de pathologies, l’efficacité des traitements, la tolérance aux médicaments et la qualité de vie. Il est réjouissant de pouvoir enfin dire sans l’ombre d’un doute que oui, nos intestins sont importants ! Alors, qu’en est-il de la flore bactérienne qui constitue notre microbiote ? Je  voulais attirer l’attention sur une souche de probiotiques spécifique : Saccharomyces boulardii.

S. boulardii n’est pas une bactérie à proprement parler, comme Lactobacillus ou Bifidobacterium, mais un type de « bonne » levure bien connu pour sa capacité à prévenir et traiter la diarrhée liée à la prise d’antibiotiques ou infectieuse. Il existe également des preuves indiquant que S. boulardii est capable de prévenir et de traiter l’imperméabilité intestinale[7] et d’atténuer les symptômes associés au syndrome du côlon irritable (SCI) (ballonnements, douleurs abdominales et selles irrégulières).[8] Des études complémentaires montrent qu’il est nécessaire d’approfondir les recherches sur l’utilisation de S. boulardii pour aider à atténuer des problèmes d’inflammation intestinale comme la maladie de Crohn, les colites, les infections par Helicobacter pylori, la candidose, la dyslipidémie et les proliférations bactériennes dans l’intestin grêle.[9]

Comment S. boulardii « resserre les écarts » dans l’imperméabilité intestinale ? 

S. boulardii est une levure probiotique découverte en 1920 par un biologiste français nommé Henri Boulard. Quand Boulard s’est rendu en Indochine, il a remarqué que les personnes qui ingéraient une boisson préparée à partir d’écorces de litchi et de mangoustan semblaient être protégées contre la diarrhée.[10] À quoi cela était-il dû ? C’est là que S. boulardii entre en jeu avec ses propriétés antimicrobiennes et sa capacité à soutenir la modulation immunitaire, l’activité enzymatique, la production d’acides gras à courte chaîne et la fonction de la barrière intestinale.

Skin Surface La modulation immunitaire

S. boulardii contribue à un microbiome sain et une immunité renforcée en :  

  • soutenant la modulation d’une immunoglobuline importante, l’IgA sécrétoire de la paroi intestinale, qui constitue la première ligne de défense contre des pathogènes dans les intestins ;[11]
  • augmentant la mucine, qui crée une couche protectrice de sorte que les pathogènes aient plus de difficulté à se fixer aux cellules intestinales et à les endommager ; et 
  • en régulant à la hausse les cellules de Kupffer dans le foie, ainsi que la concentration sérique d’IgM qui filtrent respectivement les protéines et bactéries néfastes dans le sang et assurent la première ligne de défense de l’immunité systémique.[12]

Chez des personnes en bonne santé, S. boulardii assure une protection contre la réponse immunitaire inflammatoire associée à la diarrhée causée par des pathogènes (diarrhée du voyageur).[13] Stable à 37 °C, la structure rugueuse de la paroi cellulaire de S. boulardii serait impliquée dans la stimulation des cytokines du système immunitaire, notamment les interleukines (IL)‑1β, IL‑12, IL‑6, TNFα, ainsi que IL‑10. Elle contribue également à la maturation des cellules dendritiques par le biais de l’induction de  CD80 et CD86.[14] Dans les études animales, S. boulardii régule à la hausse la phosphatidylinositol 3‑kinase (PI3K), qui est une protéine importante, nécessaire pour assurer des fonctions essentielles des cellules humaines, et que l’on voit souvent décliner dans des états d’oxydation, d’inflammation[15] et de cancer.[16]

Un soutien enzymatique pour la paroi intestinale

Les cellules du tractus intestinal se renouvellent naturellement tous les trois à cinq ans, mais ce cycle s’intensifie pendant une infection ou une inflammation. Les cellules immatures de la paroi intestinale qui viennent remplacer les précédentes ne disposent pas de quantités suffisantes d’enzymes saines spécifiques à la bordure en brosse ni de transporteurs nécessaires à l’absorption des nutriments. Cela peut amener encore plus d’hydratation dans la lumière intestinale et réguler le cycle diarrhéique à la hausse.[17] L’activité enzymatique de S. boulardii, que l’on peut également qualifier « d’effets trophiques », aide les entérocytes immatures en augmentant les enzymes qui servent à décomposer les aliments et les toxines bactériennes.[18] La production enzymatique de S. boulardii peut ainsi aider à limiter le cycle des troubles intestinaux inflammatoires, de la diarrhée et de l’imperméabilité intestinale par le biais de mesures préventives qui aboutiront à terme sur la guérison.

La production d’acides gras à courte chaîne

S. boulardii est également considéré comme un prébiotique, grâce à ses composants de paroi cellulaire  (glucanes, mannoprotéines et chitine) qui alimentent les bactéries du gros intestin qui sont chargées de la production des acides gras à courte chaîne (AGCC), essentiellement de l’acétate, du propionate et du butyrate. Les nombreuses fonctions des AGCC attestent du rôle important qu’ils assurent dans la santé intestinale et le métabolisme de l’hôte. C’est en particulier grâce à ce mécanisme que S. boulardii est censé aider le microbiote à retrouver plus rapidement son état normal après un traitement antibiotique.[19]

 

Des effets antimicrobiens

La diminution des dégâts causés par des agents pathogènes va réduire la probabilité d’une imperméabilité intestinale et des effets qui en découlent. S. boulardii est la première levure à être utilisée en tant que probiotique et la recherche valide les bienfaits de son utilisation en tant que traitement d’appoint en cas d’infection par Helicobacter pylori ; de diarrhée résultant de Clostridium difficile, Salmonella, Shigella et Escherichia coli ; d’infection par des virus rota ;[20] de candidose ; et de prolifération bactérienne dans l’intestin grêle.[21] Comment y parvient-il ? S. boulardii se lie directement aux pathogènes, les empêche de se fixer à la paroi intestinale et élimine les toxines libérées par les bactéries invasives.[22]

La fonction de la barrière intestinale

S. boulardii maintient l’intégrité des jonctions communicantes qui se trouvent entre les entérocytes, il prévient l’activation des voies de signalisation NF‑κB et des MAP kinases – qui freinent l’IL‑8.[23] Il régule également le renouvellement de la cadhérine E, un composant qui se trouve à la surface des cellules et leur permet d’adhérer les unes aux autres.[24] En ce qui concerne Candida albicans, S. boulardii pourrait l’empêcher de développer des filaments (un moyen souvent utilisé pour s’infiltrer dans la paroi intestinale), des biofilms et d’adhérer à la paroi intestinale.[25]

Dosage et durée

Si vous n’êtes pas suivi par un naturopathe, il est recommandé de suivre les indications inscrites sur l’étiquette d’un produit approuvé par Santé Canada et comportant un numéro de produit naturel (NPN). Sinon, un naturopathe pourrait vous recommander une durée plus ou moins longue, en fonction de votre situation, par exemple en cas de gastrite, d’imperméabilité intestinale, de SCI, de gastro-entérite infectieuse ou de diarrhée du voyageur. La recherche indique qu’il faut trois jours pour atteindre une concentration thérapeutique dans le côlon et qu’elle disparaît au bout de deux à cinq jours après l’arrêt.[26] Un seul cas de fongémie avec S. boulardii a été signalé, chez une patiente immuno-compromise, âgée de 79 ans et en période postopératoire.[27]

Bien que S. boulardii reste stable dans l’environnement acide de l’estomac et lorsqu’il est exposé à des sels biliaires, et des enzymes gastro-intestinales,[28] il est néanmoins recommandé d’opter pour des capsules à enrobage entérique. D’autre part, contrairement à la plupart des souches de probiotiques, il reste stable à température ambiante. Il n’est donc pas nécessaire de le conserver au réfrigérateur avant ouverture. En revanche, une fois le produit ouvert, et si vous souhaitez le conserver pendant une longue durée, il est préférable de le réfrigérer afin de bénéficier d’une puissance et d’effets optimums. En cas de mélange avec d’autres souches nécessitant une réfrigération, telles que Lactobacillus et Bifidobacterium, il faudra alors impérativement le réfrigérer. S. boulardii n’est pas une levure commensale et, en raison de ses propriétés fongiques, il a une résistance naturelle aux antibiotiques. Il a donc moins de chances de provoquer une résistance antimicrobienne et peut être co-administré sans risque avec des antibiotiques.[29]

Conclusion

L’activité de S. boulardii dans le gros intestin et l’intestin grêle inclut une modulation immunitaire, une activité enzymatique, la production d’AGCC, des propriétés antimicrobiennes et la fonction de barrière intestinale. S. boulardii est prescrit pour traiter des problèmes de dysbiose, à la fois chez l’enfant et chez l’adulte, et produit une activation immunitaire générale, et non-spécifique, du microbiote intestinale chez des personnes en bonne santé.[30] Pour les effets précédemment cités, il peut être incorporé dans un régime incluant des probiotiques multisouches réfrigérés à enrobage entérique contenant du Lactobacillus‑ ou à base de Bifidobacterium.

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