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La prolifération bactérienne de l’intestin grêle

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La prolifération bactérienne de l’intestin grêle (SIBO pour Small Intestine Bowel Overgrowth) se produit lorsque l’ensemble des populations de bactéries se développe anormalement dans l’intestin grêle – en particulier les types de bactéries qui ne sont pas habituellement présentes dans cette partie du système digestif. Une fois installées dans l’intestin grêle, ces bactéries peuvent être à l’origine de nombreux symptômes en faisant fermenter des aliments comme les fibres et les sucres, ce qui se produit normalement dans le gros intestin. Le processus de fermentation des aliments entraine la libération de gaz d’hydrogène, de méthane et d’hydrogène sulfuré dans l’intestin grêle, ce qui peut causer des symptômes tels que des ballonnements, des douleurs, de la dyspepsie, une motilité intestinale réduite (constipation) ou une pression osmotique accrue dans le côlon (diarrhée). Généralement, les SIBO de type hydrogénique et hydrogénique sulfuré sont corrélées avec des selles molles / de la diarrhée, tandis que les SIBO de type méthaniques sont corrélées avec de la constipation. 1 Le SIBO peut être à l’origine de nombreux problèmes digestifs, surtout chez les personnes avec un diagnostic de syndrome du côlon irritable (SCI), étant donné que l’on estime qu’entre 7 % et 78 % des personnes ayant le SCI auraient également un SIBO, et qu’il ne s’agirait donc pas d’un trouble d’origine psychiatrique. 2

Quels sont les symptômes d’un SIBO ?

Les symptômes d’un SIBO peuvent inclure des ballonnements, de l’inconfort / des maux d’estomac après les repas ; des éructations ou des gaz excessifs; de la nausée, des brûlures d’estomac / du reflux gastro-œsophagien (RGO) ; une sensation d’estomac plein et une digestion lente ; des selles molles ou de la constipation chronique ; une alternance de selles molles et de constipation ; des selles urgentes ; de la stéatorrhée (excès de graisses dans les selles) ; de l’halitose (mauvaise haleine) ou un mauvais goût dans la bouche ; des problèmes cutanés comme de l’acné ou de la rosacée3de la fatigue, une perte de poids et des carences en fer ou en vitamine B12 4ou une combinaison de plusieurs de ces éléments. Les bactéries utilisent à la fois du fer et de la B12 pour leur propre métabolisme, ce qui peut résulter sur une insuffisance fonctionnelle en fer et B12 biodisponibles dans le corps. 5 On peut suspecter un SIBO lorsque l’on constate une anémie ferriprive>6 ou une anémie mégaloblastique sans explication claire. 7 On peut également suspecter un SIBO lorsqu’un régime pauvre en FODMAP (oligosaccharides, disaccharides, monosaccharides et polyols fermentescibles) est bénéfique ou si une alimentation riche en fibres aggrave les symptômes intestinaux. Un SIBO peut également être envisagé s’il est difficile de déterminer quels aliments aggravent les symptômes en faisant des restrictions alimentaires et si des probiotiques seuls semblent davantage provoquer des symptômes qu’ils ne les atténuent. Certains aliments ont effectivement tendance à aggraver les symptômes intestinaux en cas de SIBO. Ces aliments sont l’ail, les oignons, les pommes, les poires, les abricots, les mangues, les pêches, les prunes, le chou-fleur, le brocoli, les asperges, le chou, les haricots, les lentilles et les légumineuses.

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La cause sous-jacente

Ce qui est unique avec le SIBO, en comparaison avec les autres troubles du système gastro-intestinal (GI), c’est le dysfonctionnement de la motilité des nerfs intestinaux que l’on appelle le complexe moteur migrant (CMM). 8 Lorsqu’il fonctionne correctement, le CMM assure le transit des aliments entre l’intestin grêle et le gros intestin. Il est possible qu’il y ait une association avec une gastro-entérite virale et le déclenchement de symptômes du SCI comme de la diarrhée chronique, de la constipation chronique et du RGO.9,10,11 Une maladie infectieuse aiguë peut être à l’origine d’un affaiblissement du CMM12et les facteurs qui peuvent être associés à une dégradation du CMM sont du diabète prolongé ou des troubles dans les tissus conjonctifs. Dans une étude sur une épidémie de gastro-entérite (GE) virale d’origine hydrique, il a été démontré que la GE à norovirus entraine le développement d’un SCI post-infectieux chez une part notable de patients (13%), 13, ce qui peut potentiellement entrainer un SIBO. Lorsque le CMM ne fonctionne pas correctement, les aliments mettent plus de temps à sortir de l’intestin grêle et l’évacuation des bactéries de l’intestin grêle vers le côlon est donc insuffisante.

Il peut y avoir d’autres causes dans le développement d’un SIBO et cela peut inclure de l’hypochlorhydrie, l’utilisation chronique de médicaments antiacides,14, une insuffisance biliaire,15,16 une lésion cérébrale traumatique,17, une adhérence / un rétrécissement intestinal(e)18, un dysfonctionnement de la valvule iléocæcale,19une chirurgie intestinale, la maladie cœliaque, une gastroparésie (due à un diabète) et une maladie intestinale inflammatoire20ou tout autre trouble pouvant causer une accumulation de bactéries dans l’intestin grêle, en raison d’une évacuation inefficace ou d’un retour des bactéries depuis le gros intestin.

Les troubles associés à un SIBO sont très nombreux : perméabilité intestinale,21stéatose hépatique non alcoolique, ,22,23 cystite interstitielle, 24, hypothyroïdisme25syndrome des jambes sans repos, 26intolérance à l’histamine,27ablation de la vésicule biliaire, 28affections auto-immunes, maladie de Crohn, 29colite ulcéreuse30et sclérose systémique. 31,32. La recherche a démontré une corrélation entre la stéatose hépatique non alcoolique et une perméabilité intestinale accrue, mais également avec une plus forte prévalence de SIBO.33. D’autre part, il a également été constaté que la stéatohépatite non alcoolique était fortement corrélée avec le SIBO. 34 Cependant, ces découvertes indiquent une corrélation, mais pas de causalité et il pourrait donc y avoir un lien étroit entre ces affections.

En cas de doute, un SIBO peut être confirmé avec un test d’haleine spécifique, qui est une méthode courante et non-invasive. Il convient toutefois de noter que des recherches sont encore en cours, afin de déterminer quel test est le plus efficace, car les substrats utilisés pour le test produisent souvent des faux résultats positifs et les écarts de durée du transit intestinal chez chaque patient peuvent également créer de faux résultats positifs et négatifs. 35 En comparaison avec la référence absolue, qui est l’aspiration jéjunale, les tests d’haleine ont une forte spécificité, mais une très faible sensibilité.36 Toutefois, avec des recommandations adéquates, le test d’haleine peut être très utile. En cas de résultat positif, l’administration d’un traitement d’éradication approprié sera déterminée en fonction des résultats. Une fois la prolifération traitée, les symptômes digestifs et autres symptômes associés disparaissent généralement et on peut ensuite s’occuper du système digestif avec un protocole de rétablissement comprenant des modifications alimentaires, et dans le mode de vie, ainsi que des plantes et des nutraceutiques.

Qu’est-ce que le test d’haleine du SIBO et à quoi peut-on s’attendre ?

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Le test d’haleine du SIBO inclut un régime de préparation le jour qui précède le test, afin de limiter les possibilités que certains aliments interfèrent avec les résultats du test. Les bactéries formant le SIBO se nourrissent essentiellement de sucres et de produits végétaux, par conséquent, le centre de la santé digestive recommande de ne manger que les aliments suivants pendant le régime de préparation : 37

  • · Toute viande, volaille, tout poisson ou fruit de mer n’ayant pas été fumé ou saumuré
  • · Du riz blanc nature, cuit à la vapeur
  • · Des œufs
  • · Du bouillon de viande clair (uniquement à base de viande ; pas d’os, de cartilage ou de légumes)
  • · Des huiles / graisses (coco / olive / huiles végétales, beurre ou lard)
  • · Du sel et du poivre (pas d’herbes ou d’épices)
  • · Du café noir léger ou du thé noir léger (nature, sans édulcorant ou crème, pas de thé vert ou de tisanes)
  • · De l’eau du robinet (pas d’eau minérale ou avec des additifs)

Il est également recommandé de jeûner pendant toute une nuit et après cela, un échantillon d’haleine de référence est prélevé. Le jour du test, une solution est ingérée (généralement de la lactulose) et des échantillons d’haleine sont prélevés dans les trois heures suivantes, afin d’évaluer la production d’hydrogène et de méthane par les bactéries de l’intestin grêle, le cas échéant. Si une augmentation des gaz est observée, le résultat sera considéré positif. L’hydrogène et le méthane sont les deux principaux gaz que le test d’haleine du SIBO peut détecter. 38 Des tests plus récents peuvent également détecter des gaz d’hydrogène sulfuré.39,40,41

Que faire après avoir obtenu un résultat positif ?

Le traitement du SIBO se fait en deux phases, à savoir une phase d’éradication ou antimicrobienne et une phase de rétablissement, qui inclut la guérison du système digestif et de la prévention, afin d’éviter une récidive du SIBO.

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Première étape : la phase d’éradication

Le traitement dépend de gaz spécifiques, dont les quantités relevées ont été considérées en dehors des plages recommandées, et il pourra inclure deux à quatre semaines de traitement avec plusieurs antimicrobiens, qui pourront inclure des antibiotiques (néomycine ou rifaximine),42,43,44,45 des plantes antimicrobiennes (hydraste du Canada, myrrhe, thym, ail, origan, berbérine, busserole) et de l’hydrosol d’argent46,47 et si cela ne produit pas d’effets, des perturbateurs du biofilm (c’est-à-dire, des agents qui éliminent le revêtement protecteur qui se trouve sur les bactéries que l’on veut éradiquer). À cet effet, on pourra utiliser du sous-nitrate de bismuth, du DMPS et de l’acide alpha-lipoïque, de la N‑acétylcystéine et de l’huile de nigelle.48,49 Des solutions complémentaires peuvent également être envisagées pour une approche holistique, notamment l’inclusion d’agents soutenant les voies de détoxification du foie, afin de limiter des éléments comme les radicaux libres. Cela inclut du chardon-marie, du curcuma, du pissenlit, de l’artichaut, de l’acide alpha-lipoïque, l’herbe Schizandra chinensis et de la N‑acétylcystéine. En pratique, en tant que naturopathe, il semblerait qu’une combinaison d’antibiotiques comme de la rifaximine et d’un antimicrobien naturel soit l’intervention la plus efficace pour éradiquer le SIBO, probablement en raison des effets complémentaires des plantes médicinales.

Dans une petite étude, il a été démontré que le probiotique Lactobacillus casei avec un traitement antibiotique était plus efficace que des antibiotiques seuls pour atténuer les symptômes. 50 Le probiotique Saccharomyces boulardii pourrait également être envisagé pour les personnes ayant un syndrome de l’intestin court, 51 mais en revanche, il ne s’est pas avéré efficace pour les patients ayant un SCI.

EL’éradication nécessite généralement deux à quatre semaines de traitement, mais des agents perturbateurs de biofilm peuvent être utilisés en amont. En alternative aux antimicrobiens, le régime élémentaire (une combinaison d’acides aminés, de sucres, de graisses, de vitamines et de minéraux spécifiques) peut être utilisé pendant une durée de 14 à 21 jours. Le régime élémentaire est le seul régime appuyé par des preuves scientifiques pour son efficacité potentielle en cas de SIBO52 En revanche, ce régime ne contient aucun aliment solide, ce qui le rend particulièrement difficile à suivre et potentiellement néfaste pour certaines populations vulnérables.

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Deuxième étape : la phase de rétablissement

Une simple suggestion pour le SIBO, afin d’éviter une récidive, est de laisser au moins 2,5 à 3 h s’écouler entre les repas. Cela correspond à la durée nécessaire pour que le CMM réalise une contraction complète et évacue toutes les bactéries de l’intestin grêle vers le côlon. D’autre part, il est recommandé d’éviter les aliments fermentés comme le kimchi, la choucroute, le kombucha, les yaourts, le miso, etc. pendant le traitement, afin d’éviter d’alimenter encore plus la prolifération bactérienne, et cela s’applique également aux bactéries bénéfiques.

suppléments de guérison intestinale comme de la L‑glutamine, du zinc carnosine, de la N‑acétylglucosamine et des oméga‑3. Des prokinétiques (un type de médicament qui renforce la motilité gastro-intestinale), par exemple un agent pharmacologique appelé prucalopride53, ou des traitements naturels comme le 5‑hydroxytryptophane (5‑HTP) ou du gingembre pourrait également être suggéré afin de renforcer le CMM. D’autres prokinétiques pharmaceutiques comme de l’érythromycine à faible dose54 et de la naltrexone à faible dose peuvent également être utilisés et sont particulièrement bénéfiques pour les personnes avec des conditions auto-immunes. Il est également crucial d’apporter du soutien en cas d’hypochlorhydrie gastrique (qui affaiblit la fonction antibactérienne de l’estomac) ou de dysfonction dans la partie inférieure de l’œsophage, en utilisant par exemple du chlorhydrate de bétaïne, des amers à base de plantes comme de la gentiane ou du D‑limonène (également un prokinétique doux). Pour des recommandations de traitement spécifiques, il est préférable de vous entretenir avec un professionnel de la santé, un naturopathe ou votre médecin traitant.

Conclusion

Le SIBO est une cause de problèmes digestifs de plus en plus courante et comme cela a été mentionné, il peut exacerber de nombreux symptômes et problèmes de santé associés. Il est donc impératif d’éradiquer la prolifération, de soigner le système digestif et de prendre des mesures préventives, afin d’éviter une récidive du SIBO et de rester en bonne santé.