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Pirater le bonheur

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Avez-vous déjà entendu ce genre de discours ?
« Je veux juste que tu sois heureux. »
« Je veux juste que tu sois heureux. »
« Il faut que tu y travailles. Essaie simplement d’être heureux. »
Être confronté à d’autres personnes en détresse peut susciter de la tristesse, mais dire à quelqu’un d’être heureux quand il ne l’est pas ne semble pas être très efficace. En fait, essayer d’être heureux est souvent la source de notre malheur ! Des chercheurs en psychologie ont même voulu le prouver, en mettant à l’essai des personnes à qui on avait ordonné de se sentir aussi heureuses que possible en écoutant de la musique agréable. Le résultat, c’est qu’elles étaient de plus mauvaise humeur que celles qui avaient été exposées à la même musique agréable sans aucune instruction [1].

Courir après le bonheur est un phénomène culturel dans le monde occidental qui fait débat : cela produit-il plus de mal que de bien [2] ? La volonté de vouloir constamment être heureux ne semble pas être une approche authentique du bonheur [3]. Le corps et l’esprit, bien que connectés, peuvent parfois diverger. Pensez par exemple à une dispute avec un proche ; même si l’on tient à cette personne, on aimerait tout de même à ces moments-là être physiquement éloigné d’elle. Les sentiments que nous ressentons, par le biais de notre conscience et de nos sensations corporelles, peuvent ne pas coïncider avec notre psychologie. Nous pourrions donc penser que nous sommes heureux alors que notre corps nous dit le contraire. Il est possible de contourner ces impulsions, en comprenant comment « pirater » notre bonheur pour que la substance chimique opposée, le cortisol (également appelé hormone du stress), ne prenne pas le dessus.

Planifier du bon temps

Définir des priorités et planifier des moments et des activités qui suscitent réellement des émotions positives. C’est une idée qui a été étudiée par la chercheuse en psychologie, la Dre Lahnna Catalino. Elle et son équipe ont défini le Projet de priorisation du bonheur, grâce auquel nous pouvons prédire le bonheur en définissant et en planifiant des moments qui créent du bonheur en nous, en opposition avec l’expérience émotionnelle moment-à-moment [4]. Une stratégie pour créer ces moments est la « sélection de situations », où nous basons nos décisions sur ce qui compte le plus, ce qui est significatif, ou ce qui nous apporte de la joie. Cela pourrait être par exemple de prévoir du temps quotidien pour une pause de méditation, prendre le temps de commencer un nouveau loisir, ou se créer une journée « spa à la maison ».

Cette stratégie consiste à intégrer constamment des activités plaisantes dans notre emploi du temps, plutôt que d’espérer le bonheur en attendant le prochain événement heureux, ce qui peut parfois ressembler à des montagnes russes émotionnelles. Un point important : il semblerait que le fait de juger notre bonheur serait un obstacle à notre capacité d’être heureux. Autrement dit, en nous sondant excessivement afin de déterminer si nous sommes heureux, nous nous empêchons de l’être ! Une des principales caractéristiques de vivre dans l’instant présent et joyeux est de ne pas trop se projeter ou se juger.

Neurotransmetteurs

Comment le corps, via ses agents biochimiques, contribue-t-il aux sensations et à l’expérience du bonheur ? La réponse passe tout d’abord par la compréhension des neurotransmetteurs et de leur importance. Les neurotransmetteurs sont les petits messagers qui relient notre système nerveux à notre corps, c’est-à-dire à nos muscles, nos glandes, et d’autres nerfs. J’aime les comparer à un orchestre symphonique. Parfois, l’un d’entre eux dirige le groupe, et parfois ils travaillent de concert et créent une harmonie.


  • La dopamine est l’hormone de la récompense
  • La dopamine est l’hormone de la récompense
  • La sérotonine est l’hormone de l’humeur
  • L’endorphine est l’hormone de l’arrêt de la douleur

Chacune de ces hormones est naturellement produite à l’intérieur du corps, et les conditions suivantes pourraient suggérer comment ces composés nous permettent de ressentir du bonheur, plutôt que de le penser.

La dopamine : l’hormone de la récompense

Elle augmente en célébrant les petites victoires, suite à l’accomplissement d’une tâche, en mangeant de la nourriture que nous aimons, ou en cultivant l’art de prendre soin de soi. Ce neurotransmetteur contribue à créer un sentiment de satisfaction et est également impliqué dans la motivation et l’attention. Il nous aide aussi à réguler nos mouvements, à apprendre, et à produire des réponses émotionnelles [5]. La dopamine stimule la curiosité, une attitude de recherche de sensations et d’excitation, et un comportement orienté par des objectifs. Il a été démontré que le manque de sommeil fait diminuer la dopamine et peut contribuer à une baisse de l’attention et de la concentration [6]. Les aliments qui aident à stimuler la dopamine sont les aliments riches en tyrosine comme les lentilles, le fromage, les noix ; et les aliments riches en magnésium comme les graines et les céréales complètes. La l théanine, que l’on trouve dans le thé, peut également être utile pour rééquilibrer les niveaux de dopamine [7].

La sérotonine : l’hormone de l’humeur

Elle est stimulée par la méditation et le yoga, par l’exposition au soleil, ou par le mouvement constant — par exemple, en marchant dans la nature, en courant, ou en faisant du vélo [8]. Les études scientifiques sur la pleine conscience et d’autres techniques de méditation suggèrent que l’adoption de ces modes de vie puisse améliorer les états d’humeur dépressifs [9].

L’ocytocine : l’hormone de l’amour

Elle est produite lors de situations agréables comme embrasser un membre de sa famille, jouer avec un chien, s’occuper d’un bébé, tenir la main de quelqu’un, faire un compliment, ou avoir des conversations plaisantes. L’empathie semble faire augmenter l’ocytocine, ce qui stimule la générosité et peut contribuer au bonheur [10]. Un article publié dans le Harvard Business Review pointe l’efficacité d’une gestion se faisant par le biais de conversations positives et ses effets sur l’ocytocine. Judith Glaser, auteure de Conversational Intelligence (L’intelligence de conversation), décrit dans l’article que les gérants rencontrent un plus franc succès lorsqu’ils arrivent à susciter un sentiment d’inclusivité et d’écoute ainsi qu’une discussion ouverte. Cette approche consciencieuse peut littéralement avoir un effet sur la biochimie de notre corps [11]. L’ocytocine est connue comme l’hormone des câlins, et on l’associe aux liens affectifs et à l’amour. Il n’est pas surprenant que les animaux, et surtout les chiens, soient utilisés comme « pourvoyeurs de soutien émotionnel » dans un grand nombre de situations.

L’endorphine : l’hormone de l’arrêt de la douleur

Le rire, certaines huiles essentielles, le chocolat, et l’exercice contribueraient à la libération d’endorphines. Une petite étude a démontré que l’huile essentielle de lavande, utilisée en aromathérapie, est bénéfique en cas de troubles du sommeil chez des patients âgés atteints de démence. On pense que les composés de la lavande responsables de cet effet agiraient en activant la libération d’endorphines et de sérotonine [12]. Les bêta-endorphines sont des hormones peptidiques naturelles et des « endogènes » ou opioïdes produits par le corps. La molécule de la morphine isolée à partir du pavot est le composé antidouleur le plus puissant qui soit, et le mot endorphine dérive de la combinaison des mots « endogène » et « morphine » [13]. Ces substances chimiques se fixent aux récepteurs opioïdes du corps qui inhibent les voies de signalisation de la douleur. Le rôle des bêta-endorphines dans l’humeur et le bonheur n’est pas encore bien compris, mais le fait d’être attentif à ces substances chimiques et à leurs impacts sur la perception de la douleur pourrait contribuer à des théories sur le piratage des molécules du bonheur.

Conclusion

L’expression selon laquelle « le bonheur vient de l’intérieur » a bien une part de vérité ! Bien que les circonstances de la vie déterminent grandement notre bonheur, elles ne sont pas un indicateur réaliste du bonheur en général. Nous pouvons aussi cultiver le bonheur en comprenant un peu mieux ce que nous pouvons faire pour nous sentir plus heureux, en nous mettant en accord avec notre corps, en écoutant les petits signaux, et en gardant à l’esprit qu’il existe un rythme et un ordre naturels à notre psychophysiologie. Je vous encourage à créer ces petits moments et à faire passer votre bonheur en priorité !