Récapitulatif de la recherche sur les nutraceutiques de premier plan

La prise de conscience du public vis-à-vis de la nutrition est devenue de plus en plus manifeste au cours des dernières années et l’on constate que les gens sont désormais plus enclins à se prendre en charge sur le plan de la santé. L’objectif collectif d’être en meilleure santé a naturellement incité bon nombre de personnes à s’informer davantage sur les divers moyens d’améliorer leur alimentation et d’utiliser des nutraceutiques. Les nutraceutiques devraient être utilisés en complément d’une alimentation riche en nutriments et ne devrait pas se substituer à cette dernière Un régime équilibré – essentiellement composé d’aliments complets, non transformés, généralement sans additifs et sans produits agricoles chimiques et toxiques – fournit une importante quantité de macro- et de micronutriments qui sont essentiels pour rester en bonne santé. ^1,2

Il est nécessaire d’examiner attentivement la situation avant de prendre la décision d’opter pour une approche basée sur l’alimentation seule ou d’avoir recours à des nutraceutiques dans un cadre thérapeutique, car la consommation de certains nutriments pourrait être bénéfique pour certaines personnes. Il faut évidemment tenir compte de problèmes de santé qui peuvent limiter l’absorption des nutriments, comme les maladies inflammatoires intestinales, l’hypochlorhydrie, la malabsorption des acides biliaires et les maladies infectieuses chroniques. D’autres états physiologiques naturels et normaux, comme la grossesse et le vieillissement, peuvent également augmenter les besoins nutritionnels. Il est crucial de tenir compte des procédés de fabrication et des additifs inclus dans les aliments qui peuvent considérablement affecter la manière dont une personne réagit à un aliment. ^3,4

Voici donc un récapitulatif sur une sélection de nutraceutiques de premier plan, avec des informations générales sur la biodisponibilité et les nouvelles recherches. Les suggestions de dosage données ci-dessous sont indiquées en apports nutritionnels recommandés (ANR), apports adéquats (AA) et apport maximal tolérable (AMT) selon Santé Canada.

 Vitamine D₃₃

La vitamine D₃ (cholécalciférol) est une vitamine liposoluble et elle agit comme une pro-hormone (précurseur d’hormone). La vitamine D contribue à la minéralisation et au remodelage des os, en augmentant l’absorption intestinale du calcium et du phosphore. Elle joue un rôle dans la fonction neuromusculaire et la régulation de l’insuline, influence la croissance et la différenciation cellulaire, et module la fonction immunitaire. La vitamine D est naturellement présente dans le poisson et en petites quantités dans d’autres aliments (ex : fromage, jaune d’œuf, foie de bœuf).^5,6

Biodisponibilité

Étant donné que la vitamine D est biologiquement inactive, elle passe par deux réactions d’hydroxylation ; d’abord dans le foie afin de former de la vitamine D 25 hydroxy (25(OH)D), puis dans les reins afin de produire de la vitamine D 1,25 dihydroxy (1,25(OH)₂D), qui est la forme biologiquement active de la vitamine D et qui est une hormone stéroïdienne. Dans la peau, la provitamine D₃ (7 déhydrocholestérol) est convertie en vitamine D₃ après une exposition au soleil ou à d’autres sources de lumière ultraviolette. La vitamine D₂ (ergocalciférol) est produite par la radiation solaire de provitamine D₂ (ergostérol), un stérol présent dans les champignons. La vitamine D devient un nutriment essentiel lorsque l’exposition à la lumière du soleil est insuffisante. Les sources alimentaires pourraient en effet ne pas en fournir suffisamment pour traiter une carence.^7,8,9,10

Dosage

Les recommandations actuelles suggèrent aux adultes âgés de 19 à 70 ans de consommer 600 à 4 000 unités internationales (UI) de vitamine D par jour, et 800 UI par jour à partir de 71 ans. ¹¹

Nouvelles recherches

Les carences en vitamine D sont associées à une augmentation du risque de mortalité par cancer, maladie cardiovasculaire et respiratoire. Le risque de mortalité diminue drastiquement en augmentant les concentrations jusqu’à 50 nmol/L, tandis que les probabilités de mortalité toutes causes confondues avaient été estimées en hausse de 25 % pour les participants avec une concentration sérique de 25(OH)D à 25 nmol/L en comparaison avec 50 nmol/L. ¹²La supplémentation en vitamine D semble également soulager les symptômes dépressifs chez l’adulte comme cela a été constaté dans des essais randomisés contrôlés par placebo sur des populations variées – des personnes souffrant de dépression, la population générale et des personnes avec des troubles physiques divers. Les dosages variaient selon les essais, mais se situaient généralement aux alentours de 50 à 100 microgrammes par jour (2 000 et 4 000 UI, respectivement). ¹³ Il semble également y avoir un effet protecteur dans la supplémentation anténatale de cholécalciférol. Lorsque la mère avait pris 1 000 UI de vitamine D par jour à partir de 14 semaines de grossesse et jusqu’à l’accouchement, le risque de développer de l’eczéma atopique était réduit pour le bébé. ¹⁴ Une nouvelle étude observationnelle de l’Université d’Australie du Sud a démontré un lien direct entre la démence et les niveaux de vitamine D. Une association inverse a été observée entre les taux de 25(OH)D et le volume de l’hyperintensité de la substance blanche, et les carences ont été associées à un risque accru de démence et d’AVC. Chez certaines populations, les cas de démence (jusqu’à 17 %) pourraient être atténués en rétablissant les niveaux de vitamine D (50 nmol/L). ¹⁵

Vitamine _K₂

La vitamine K est une vitamine liposoluble et le terme générique que l’on emploie pour désigner un ensemble de composés structurellement reliés avec un noyau 2 méthyl 1,4 naphthoquinone, et ayant une activité antihémorragique. La vitamine K₂ est impliquée dans le métabolisme du calcium, notamment en guidant le calcium vers le système squelettique et en empêchant une calcification artérielle. On utilise de la vitamine K pour traiter les carences en vitamine K causées par des antibiotiques à large spectre, des céphalosporines et de la prednisone. Elle est impliquée dans la coagulation sanguine, le métabolisme osseux, la prévention de la minéralisation vasculaire et la régulation de fonctions cellulaires variées.^16,17,18

On trouve de la phylloquinone (vitamine K₁) dans les légumes feuillus de couleur verte et dans les huiles végétales, et de petites quantités de ménaquinone (vitamine K₂) dans la viande, les produits laitiers et les œufs. La ménaquinone 7 (MK 7) est la fraction avec la biodisponibilité et l’activité les plus élevées des ménaquinones formant la vitamine K₂. Le soja fermenté (natto) contient de grandes quantités de ménaquinones. ¹⁹

Biodisponibilité

Un apport inadéquat en vitamine K ou le fait de ne pas consommer suffisamment de graisses avec des aliments riches en vitamine K peut contribuer à des niveaux de vitamine K insuffisants. L’hydrogénation des huiles végétales peut également affecter l’effet global de la vitamine K sur la formation osseuse. La quantité de vitamine K présente dans les aliments dépend en grande partie des souches bactériennes utilisées pendant la fabrication et des conditions de fermentation. ^20,21

Dosage

Les recommandations actuelles suggèrent aux adultes âgés de 19 ans et plus de consommer 90 à 120 UI de vitamine K par jour. ²²

Nouvelles recherches

Dans un essai clinique randomisé, en double aveugle, impliquant 244 femmes néerlandaises post-ménopausées et en bonne santé, l’administration d’une dose nutritionnelle (180 μg de MK 7) de vitamine K pendant trois ans s’était traduite par des retombées substantielles, en inhibant le durcissement des artères, surtout chez les femmes ayant un fort durcissement des artères. La MK 7 avait non seulement éliminé le durcissement des artères, mais avait également entrainé une amélioration statistiquement significative de l’élasticité artérielle. ²³ La supplémentation en vitamine K₂ a été associée à de meilleurs résultats cardiovasculaires et une amélioration potentielle de la survie chez les patients cardiaques. ²³ Une association inverse a également été établie entre un apport en vitamine K et l’incidence de cancer, ainsi que la mortalité liée au cancer, dans des études observationnelles. Dans les cellules cancéreuses, la vitamine K fonctionne en activant le récepteur stéroïdien et xénobiotique (SXR), et en régulant le stress oxydatif, l’apoptose et l’autophagie. ²⁵

Vitamin B₁₂

La vitamine B₁₂ est une vitamine hydrosoluble naturellement présente dans certains aliments, ajoutée dans d’autres et disponible sous la forme de complément alimentaire, et de médicament sous ordonnance. Les composés avec une activité de vitamine B₁₂ sont appelés des « cobalamines » en raison de leur teneur en cobalt. La vitamine B₁₂ joue un rôle dans la synthèse de l’ADN, la formation des globules rouges et le métabolisme de l’homocystéine. Elle est impliquée dans le fonctionnement du système nerveux et du système immunitaire.^26,27,28

Biodisponibilité

La méthylcobalamine et la 5 déoxy-adénosylcobalamine sont les formes métaboliquement actives de la vitamine B₁₂. L’hydroxocobalamine et la cyanocobalamine deviennent biologiquement actives après avoir été converties en méthylcobalamine ou en 5 déoxy-adénosylcobalamine. Les régimes végétaliens contiennent très peu de vitamine B₁₂ (en moyenne 0,3–0,4 μg/jour). Il est également fréquent d’observer des niveaux bas de vitamine B₁₂ chez les personnes âgées, les personnes sujettes à des anémies pernicieuses, les personnes souffrant de problèmes digestifs chroniques et les personnes prenant certains médicaments pendant de longues durées (ex : des antiacides, de l’aspirine, des contraceptifs oraux, de la metformine). Les populations à faible statut socio-économique, les femmes et les noirs américains non hispaniques sont également particulièrement concernées par un faible apport en vitamine B₁₂. ²⁹

Dosage

Les recommandations actuelles suggèrent aux adultes âgés de 19 ans et plus de consommer 2,4 mcg de vitamine B₁₂ par jour. ³⁰

Nouvelles recherches

Une étude burkinaise s’est intéressée aux effets du niveau de vitamine B₁₂ sur le développement pédiatrique. Les carences en vitamine B₁₂ chez le nourrisson affectent le développement moteur et entrainent des anémies (affaiblissement de l’érythropoïèse). Ce constat démontre à quel point les aides alimentaires à court terme se révèlent insuffisantes pour améliorer les réserves de vitamine B₁₂ chez l’enfant. Une étude intéressante sur des modèles de Caenorhabditis elegans (ascaride) a été menée afin de comprendre comment le niveau de B₁₂ en début de vie pourrait affecter la santé de l’adulte, avec l’intention de potentiellement associer l’état de carence en B₁₂ chez le nourrisson avec une propension accrue à développer de l’obésité et du diabète plus tard dans la vie. Chez les vers C. elegans, les carences en B₁₂ pendant les premières années de la vie augmentent la lipogenèse, la peroxydation lipidique et les défauts sur la lignée germinale induits par une ferroptose, ce qui se traduit ensuite par une augmentation de l’adiposité et de l’infertilité chez l’adulte. Il a d’ailleurs été suggéré de réprimer la ferroptose et la lipogenèse pour traiter des problèmes d’infertilité. ³²

Fer

Le fer est un minéral essentiel pour fournir de l’oxygène aux tissus en tant que composant de l’hémoglobine. Dans les myoglobines, le fer soutient le métabolisme musculo-squelettique et la fonction du tissu conjonctif. Le fer est également impliqué dans le développement neurologique, le fonctionnement cellulaire, la synthèse de certaines hormones, la fonction thyroïdienne et la fonction immunitaire.^33,34,35

Biodisponibilité

Le fer hémique et non hémique sont les principales formes diététiques du fer. Les plantes et aliments enrichis en fer contiennent uniquement du fer non hémique, tandis que la viande, les produits de la mer et les volailles contiennent à la fois du fer hémique et du fer non hémique. La biodisponibilité du fer hémique est plus élevée que celle du fer non hémique. La biodisponibilité du fer se situe aux environs de 5 à 12 % dans les régimes végétariens, en comparaison avec des régimes mixtes, contenant des quantités non négligeables de viande, de produits de la mer et de vitamine C qui augmente l’absorption du fer, où elle se situe généralement entre 14 et 18 %. ^36,37,38

Dosage

Les recommandations actuelles suggèrent aux adultes âgés de 19 ans et plus de consommer 8 à 45 mg de fer par jour. ³⁹

Conclusion

Même dans le domaine des vitamines et des minéraux de base, la science continue d’évoluer à mesure que nous recueillons davantage de preuves sur les effets à long terme de ces nutriments essentiels pour notre santé. Les approches basées sur l’idée de déficience opposée à la suffisance et sur des généralisations pour tous ne sont plus bénéfiques pour le bien-être. Cela nous permet d’appréhender la longévité et la santé de manière plus précise, en fonction des caractéristiques individuelles, de l’état pathologique et de l’environnement. Tout cela a des conséquences sur les quantités de nutriments dont nous avons besoin pendant des périodes différentes de notre vie. ⁴⁰

Nouvelles recherches

Une analyse génomique multivariée sur l’espérance de vie en bonne santé, l’espérance de vie parentale et la longévité – avec les données de plus d’un million de personnes - a impliqué 10 loci génomiques (près de FOXO3, SLC4A7, LINC02513, ZW10 et FGD6) associés à des effets sur les maladies cardiovasculaires, à des activités liées au vieillissement, telles que les réponses à des dommages de l’ADN, l’apoptose, l’homéostasie et, fait intéressant, le métabolisme du fer. Cette étude internationale suggère que le maintien de niveaux sains de fer dans le sang pourrait être un composant essentiel pour mieux vieillir et vivre plus longtemps.